Une journaliste me demanda, il y a quelques semaines, ce qui me poussa à réécrire et transformer en un véritable roman, L’enfant de l’Océan, mon premier livre publié en 2012.
Inspiré de faits réels, mais pas que bien sûr, le roman, Les perles nacrées de nos larmes, va plus loin que ma biographie romancée, L’enfant de l’Océan, parue en 2012. Imbibé de tendresse mais sans aucune concession, cette histoire amène le lecteur à côtoyer les
bas-fonds de la misère humaine, le désarroi, l’horreur parfois. Il nous parle, nous perturbe, interroge notre société.
Les agressions faites aux femmes se multiplient partout dans le monde. Plusieurs de ces situations ont provoqué chez moi un retour en arrière, me conduisant sur des scènes de mon passé.
J’aurais voulu livrer mon histoire mais il m’était impossible de parler banalement d’une aventure pareille. Comment faire pour parler du viol de ma mère biologique puis de ma mère adoptive, sous mes yeux ? J’avais 10 ans. On est dans quelque chose qui dépasse l’entendement, qui dépasse la condition humaine. Comment aurais-je pu parler banalement d’une histoire pareille ?
Certains faits sont réapparus il y a quelques mois. J’ai pu en parler avec mon épouse. J’aurais voulu raconter, expliquer bien avant, mais c’était impossible. On se dit que les autres vont aussi avoir du mal à entendre. Le déni devient la réaction adaptée. Le déni ne permet pas la résilience mais il permet de continuer à vivre.
Avant, j’ai voulu essayer de dire certains faits. Je voulais être normal. Comme l’explique Boris Cyrulnik, comment veux-tu être normal avec de telles choses dans ton passé. J’ai donc inventé un personnage, Gwendal. Je lui ai attribué une partie de mon histoire pour voir si les gens vont me croire. Est-ce que mon histoire va les intéresser ?
Le récit narratif me permet de m’exprimer par le biais d’un autre. Il m’est impossible de vous dire ce qui m’est arrivé parce que j’ai du mal à le formuler, mais si je passe par le détour d’un tiers, je vous raconte une histoire. Ce n’est pas la mienne mais celle de Gwendal. Alors, peut être que mon histoire vous intéressera. Vous commencerez peut être à croire, donc ce n’est déjà plus impossible. Peut-être alors pourrais-je redevenir normal, réintégrer la condition humaine puisque vous acceptez d’entendre mon histoire.
Je voulais aussi tenter de répondre, indirectement, à quelques questions, ne pas rester sur la noirceur du néant car la vie est pour moi un privilège. Je veux la respecter. Peut-on se redresser après avoir vécu l’horreur ou sommes-nous condamnés à revivre éternellement nos traumatismes ? Peut-on relever la tête, envisager un nouveau départ ou tout est-il écrit d’avance ?
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